Palaiseau, le samedi 21 mars 2020
Cher Journal,
J'ai encore passé une nuit d'une qualité assez discutable ; décidément, cette histoire de rester cloîtré à la maison passe beaucoup moins bien que ce à quoi je m'attendais. Ce n'est pourtant pas faute de me considérer comme un membre éminent du groupe de gens pour qui la distanciation sociale est un mode de vie, mais manifestement la réalité de mon terrain a bien changé depuis.
Depuis près de cinq ans, je me rends à mon travail tous les jours à pied, peu importe la saison, ou le temps qu'il fait dehors. Cette absence d'activité physique est probablement un changement beaucoup plus important de mon mode de vie qu'il ne m'aurait semblé au premier abord. Peu de temps après mon lever, qui eut lieu autour de six heures et demie du matin, sachant que j'ai du m'endormir vers une heure et demi ou deux heures, je mange un morceau puis prépare une attestation pour, je cite :
déplacement bref, à proximité du domicile, lié à l'activité physique individuelle des personnes, à l'exclusion de toute pratique sportive collective, et au besoins des animaux de compagnie.
Ensuite:
L'activité physique individuelle est indispensable. Ça m'aura permis de prendre de l'air, frais, de m'oxygéner le cerveau qui avait franchement besoin d'un rétablissement de connexion entre les neurones et le synapses, et de faire fonctionner un peu mes jambes, qui avaient grand besoin d'exercice véritable. Les initiatives pour faire du sport sans sortir de chez soi se multiplient, et c'est probablement mieux en cette situation ; mais amener de l'air frais dans un appartement peut être un exercice délicat si la géométrie d'icelui ne s'y prête pas.
Autre observation, manger varié est fondamental pour la santé et l'équilibre mental. Or, j'ai eu tendance à tirer sur la corde en attendant de faire mes courses le samedi, comme tous les samedis. La différence majeure est que en temps normal, je profite de la cantine le midi pour avoir à manger. Cette fois ci, les repas du midi sont concoctés sur mes réserves, donc mathématiquement, elles vont descendre plus vite, et tenir trois jours avec des légumes secs va correspondre à six repas peu équilibrés au lieu de trois, ce qui n'est pas négligeable. Direction donc le super Primoux, après m'être octroyé une attestation au motif de, je cite :
déplacements pour effectuer des achats de première nécessité dans des établissements autorisés (liste sur gouvernement.fr) ;
Contrairement aux échos que j'ai pu avoir de mes parents ou de mes collègues, je n'ai pas eu à attendre à l'entrée du magasin, à ma grande surprise. Il y avait effectivement des affichettes indiquant les règles en place quant aux limites du nombre de personnes, afin de réduire les risques de propagation du virus, mais il n'y avait de toutes les façons pas grand monde dans ledit magasin. Je découvre le nouvel aménagement du magasin, dans le plus pur style chirugical, avec notamment des employés masqués et gantés, et des panneaux de plexiglas au niveau des caisses. À mon grand bonheur, les légumes n'ont manifestement pas fait l'unanimité chez les mangeurs de papier toilette. On se situe à peu près une semaine après la panique initiale, donc la situation s'est probablement déjà un peu tassée. Là encore :
Le Covid-19 tue. Il sature les infrastructures de santé. Il est indispensable donc de ne pas faciliter sa propagation. Je ne ressortirais pas tant que je n'en aurais pas besoin.
Une copie de l'attestation telle que fournie ce jour au format texte est disponible en pièce jointe à cette entrée de journal, dès fois que le site web du gouvernement aie des difficultés à tenir tout seul la charge. Attention, ceci n'est pas un bingo !
Sinon, ce jour, à vingt heures, il y a de nouveau eu du bruit venant de dehors, tout comme décrit l'avant-veille. Après vérification, il s'agit d'une fanfare de balcon impromptue. Apparemment, à la lecture d'un article d'Antoine Beaupré sur les outils de communication à distance daté de ce dimanche dernier, le phénomène proviendrait de Sicile qui est en isolation depuis un peu plus longtemps que nous.
Il y aurait probablement encore à dire, mais il se fait tard, j'ai des nuits de sommeil à rattraper.
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attestation.txt | 2020-03-20 10:17 | 1.4K |