All mail clients suck. This one just sucks less.
-- Michael R. Elkins, circa 1995.
Palaiseau, le dimanche 9 février 2020,
Cher Journal,
Suite à une période de calme dans ma boîte de courriel, et suite à une volonté d'améliorer l'ergonomie du client dont je me sers pour y accéder, et au risque d'en dégrader le caractère intuitif vis-à-vis des standards courants dans ce domaine, j'ai décidé de migrer mon client de messagerie quotidien de Thunderbird vers Mutt.
Je n'abandonne pas complètement Thunderbird, qui m'aura été d'une aide précieuse pour consulter mon courriel depuis ma première boîte mail. En effet, je conserverais son usage dans mes activités professionnelles, afin de continuer à participer sereinement à l'accumulation de courriels en HTML sur les serveurs de mes employeurs, sans pour autant faire hausser trop de sourcils de la part des gens coincés avec Outlook. Je continuerais ainsi tant que l'infrastructure le permettra, c'est-à-dire probablement pas longtemps, vu la digitalisation (sic) en cours.
Thunderbird est un MUA tout à fait honorable, cependant certains points sont source de friction. Le fait d'éditer mon courriel avec vi, puis de le copier et de le coller dans l'éditeur intégré de Thunderbird, rend l'envoi de messages assez peu fluide par exemple. Alors certes, je crois me souvenir qu'il a existé des extensions pour automatiser ce genre de choses, mais les greffons ont régulièrement changé leur manière de fonctionner, et à part ceux qui ont été correctement maintenus, beaucoup sont tombé en désuétude, et ne sont plus compatibles avec les versions courantes de ce client mail.
Dans un autre style, les subtilités du texte brut et du texte flowed nécessitent de faire quelque réglages cavaliers dans la configuration avancée, le fameux équivalent Thunderbird du about:config de Firefox ; je pense notamment au réglage des lignes à 1024 caractères de longueur, afin de ne pas se retrouver à avoir des lignes tronquées, lors de l'envoi de messages de journaux système, par exemple. Je ne sais pas si c'est lié, mais du coup, certains systèmes de messagerie, notamment celui fournit par Protonmail, affichent une ligne interminable de tirets pour séparer le corps du message et la signature, en lieu et place du bon vieux séparateur "-- ".
Thunderbird est également un outil compatible avec bon nombre de plateformes, et à ce titre, il va sacrifier un certain nombre de fonctionnalités, comme l'utilisation de variables d'environnement ou de pages de manuel propre aux Unix, au profit d'une meilleur portabilité vers davantage de systèmes d'exploitation. Le manuel thunderbird(1) tel que fourni dans Debian est une page peu loquace qui va présenter les quelques options qui peuvent être passées en argument de Thunderbird, globalement peu nombreuses, puisqu'il s'agit d'un programme avant tout interactif. Ce choix technique permet d'avoir bien plus d'utilisateurs, tout en rendant la maintenance plus délicate, et le logiciel plus lourd hélas, par l'ajout de la couche de compatibilité. Mais de tels logiciels doivent exister, afin de permettre aux gens qui naviguent entre les plateformes de ne pas avoir des environnements complètement différents entre chaque machine. « Tous les clients mail sont nuls. Celui ci est juste moins nul. » disait Michael R. Elkins vers 1995 à propos de Mutt, mais Thunderbird n'existait pas encore.
Parce que Mutt est un outil plutôt spécifique aux Unix, on retrouvera les pages de manuel relativement fournies, ainsi que le support des variables d'environnement et des mailcap, pour choisir ses programmes préférés, en fonction de ce qu'on veut faire pour :
Au contraire, un client mail poids lourd, capable de lire les courriels en HTML, les pages web, les PDF, les images, et toute la famille des fichiers Microfts, va immanquablement conduire, pour chaque catégorie de fichier, à toute une variété de pannes, voir de vulnérabilités de sécurité, qui devront être reportés à la fois sur les programmes natifs, et sur le client mail. Ce n'est pas un hasard si les programmes complexes qui embarquent beaucoup de fonctionnalités ont beaucoup plus d'entrées dans les CVE que les programmes légers qui font une chose, et une seule, et aussi bien que possible.
Au regard du chiffrement du courriel de bout en bout, Mutt dispose d'une intégration de GPG soignée, en comparaison avec Thunderbird. Côté Thunderbird, la recommandation courante est d'utiliser le greffon Enigmail, qui comme indiqué avant, souffre des défauts courants des greffons. De plus, les recommandations de Riseup quant à l'usage de GPG semblaient indiquer qu'un certain nombre d'options de ce greffon ont tendance à orienter les utilisateurs vers des comportements qui pourraient leur jouer des tours, voir être dangereux. Ceci étant, l'article de Riseup lui-même ne mentionne pas l'obsolescence des SKS, du coup, je ne sais pas trop si cet article lui-même est bien à jour. Travailler directement avec GPG permet de n'avoir à retenir qu'une interface pour travailler avec les courriels chiffrés, même si ce n'est pas forcément l'interface la plus évidente au monde, loin de là.
Un autre aspect fondamental de Mutt est qu'il s'agit d'un client en mode texte. Cela a trois avantages. Le premier est que je peux mettre le nez dans mes courriels sans avoir à démarrer de serveur X, qui en général émet beaucoup plus de lumière que les consoles système. Le deuxième est que je peux utiliser un multiplexeur de terminal comme screen ou tmux, avec tous les avantages qu'apportent ces outils pour mettre en pause mon travail, et le reprendre sur un autre terminal, potentiellement à l'autre bout du monde. Le troisième est que je peux consulter mon courriel et mes archives, qui sont stockées sur le disque local depuis une connexion distante SSH en texte seul. C'est une expérience beaucoup plus fluide que de restaurer mes archives depuis les éventuelles cartouches de sauvegarde que je pourrais trimballer avec moi, ou de manipuler une interface graphique via un tunnel X/SSH qui va ramer, à part peut-être sur certaines lignes fibrées de bout en bout.
Afin de démarrer d'un bon pied avec Mutt, j'ai pris quelque notes qui ont fini par prendre une telle ampleur, que je suis allé les ranger dans la section des articles intemporels. Le lien ci-après pointe vers l'article sur l'installation et la configuration du client mail Mutt. Ayant déjà utilisé très occasionnellement Mutt par le passé, je ne m'attendais pas forcément commencer à m'en servir de manière plus poussée : la rédaction de cet article me surprend encore.
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